Vos représentants du SGEN-CFDT Picardie étaient présents lors du CTSD de l'Aisne qui s'est réuni le 6 septembre 2018.
Voici leur déclaration préalable :
Déclaration préalable du Sgen-CFDT
au CTSD de l’Aisne, séance du 6 septembre 2018
Le ministre de l’Éducation nationale a décidé d’ « ajustements » des programmes des cycles 2, 3 et 4 de mathématiques, français et enseignement moral et civique. Avec un calendrier imposé, un passage en conseil supérieur de l’éducation le 12 juillet, pour une mise en œuvre au 1er septembre. Cette manière à la fois technocratique et politicienne nous interroge.
Cela montre, une fois encore, le peu de considération du ministère pour ses personnels, sommés de passer leurs vacances à réécrire leurs séances d’enseignement. Mais la méthode montre aussi que ces ajustements ne sont pas destinés aux professionnels que sont les enseignants. En effet, un texte institutionnel aussi important que les programmes de 2015 demande, on le sait, un temps d’appropriation, en appui sur les ressources déjà importantes proposées par le biais d’Éduscol, qui dépasse une seule année scolaire.
Alors, à qui ces ajustements sont-ils destinés ?
Il semble bien que ce soit pour l’opinion publique, ou plutôt pour une certaine frange de celle-ci.
Les déclarations de la présidente du conseil supérieur des programme ont mis en avant des modifications en réalité tout à fait secondaires. Que le « prédicat » disparaisse, que l’on réintroduise la conjugaison « à toutes les personnes » du passé simple, ne sont que des points de détail par rapport aux exigences tellement plus nécessaires, que sont l’apprentissage du raisonnement ou la formation précoce de l’esprit critique ! On ne voit pas bien d’ailleurs en quoi ces changements correspondent au « bon sens » revendiqué par des acteurs majeurs du système éducatif, dont on serait en droit d’espérer un peu plus de rigueur.
Dans la communication « à usage de l’opinion », il y a aussi la dictée quotidienne et la Marseillaise – tout sauf des nouveautés, puisque le ministère précédent, sous des formes diversifiées, les revendiquait aussi ; de façon, il est vrai, moins injonctive, respectant le professionnalisme des enseignants.
Dans les ajustements des programmes d’EMC, on trouve aussi ce parfum de vieille « instruction civique » dans sa pire formulation (apprendre par cœur les institutions, les symboles…), la disparition des dilemmes moraux et de l’expression « discussion à visée philosophique et démocratique ». On peut craindre qu’il ne s’agisse plus d’apprendre à penser par soi-même, mais avant tout à obéir et respecter l’autorité : « Appliquer les règles collectives sans discussion » en est l’illustration.
Le ministère pense-t-il sérieusement que si chaque élève peut réciter les dix règles de la laïcité, alors il n’existera plus de problème de laïcité à l’École ?
Vouloir redonner confiance en l’École est un objectif que le Sgen-CFDT partage. Mais les programmes, qui ne sont pas un dossier de presse, ne sont pas le bon support. Pour atteindre cet objectif, c’est plutôt du côté de la lutte contre les inégalités sociales et scolaires qu’il conviendrait d’investir, car ce sont elles et non le prédicat qui minent sourdement l’école.
Cette démarche a en outre des effets délétères majeurs.
En voulant flatter l’opinion on prend le risque, au contraire, d’instiller un climat de défiance et d’accentuer les clivages et des tensions exacerbées et stériles, l’actualité nous l’a bien montré.
En voulant flatter l’opinion on en vient à mépriser la professionnalisme des enseignants, en renforçant les injonctions descendantes pour donner le sentiment que la maison est tenue.
En voulant flatter l’opinion enfin, on met de côté l’ambition d’une école réellement plus juste en sacrifiant et la logique de socle commun et la logique de cycle, c’est à dire d’apprentissages progressifs et adaptés à chaque élève, au profit d’une vision mécanique des savoirs fondamentaux, dont il faudrait assurer la maitrise pour tous aux mêmes échéances imposées.
C’est pour cela que le Sgen-CFDT a fait le choix, tant la situation était anormale, de boycotter la séance du conseil supérieur de l’éducation du 12 juillet. Et que, dans la continuité, il proteste contre ces changements de programme.